Les grandes dates du sauvetage en mer

La Société natio­nale de sauve­tage en mer est une des expres­sions les plus abou­ties de la soli­da­rité des gens de mer face aux drames et acci­dents mari­times à proxi­mité des côtes.

Affiches historiques expliquant le concept de société humaine pour le sauvetage en mer
1825
""
1833
""
1855
Sortie du canot Baron Larrey de son abri à Bonifacio
1865
""
1873
""
1967
""
1969
Bateau de sauvetage de la SNSM de Lancieux en mer
1970
station-snsm-aber-wrach-photo-karine-jc
1986
2011
2017
3 victimes du drame des Sables d'Olonne le 7 juin 2019
2019
Le canot de sauvetage SNS076 de Boulogne-sur-Mer en sortie en mer devant le port de la ville
2023
1825
1833
1855
1865
1873
1967
1969
1970
1986
2011
2017
2019
2023

1825
Naissance des nageurs sauveteurs et des premières sociétés locales

Les origines du sauvetage en mer

Jusqu’au XIXème siècle le sauve­tage en mer était souvent une réalité tragique, marquée par le manque de moyens tech­niques, humains et finan­ciers, qui ne permet­tait pas la mise en place d’une orga­ni­sa­tion effi­cace pouvant couvrir l’ensemble du litto­ral français.

Les techniques de réanimation des noyés étaient des plus barbares sans réelle efficacité. On mettait par exemple la victime à plat ventre sur une barrique, pour la secouer par divers mouvements. Un autre usage était de pendre le noyé par les pieds au-dessus d'un feu pour le vider de son eau, la chaleur du feu  devait évaporer l'eau avalée et l'inhalation de fumée devait le faire réagir. On pouvait aussi placer le noyé à l'intérieur d’un tonneau, que l'on roulait dans un sens puis dans l'autre pour vider l'estomac. Enfin les Hollandais créèrent les pompes fumigatoires, l’apothicaire Philippe Pla perfectionna ces boîtes en prévoyant le matériel  nécessaire à injecter de la fumée de tabac par voie rectale.

Face à ces techniques balbutiantes et aux nombreux drames observés à cette époque, des hommes se sont réunis pour donner progressivement naissance à diverses structures locales dont les équipements restaient cependant très limités.

Création de la société humaine et des naufrages (SHN) de Boulogne-sur-Mer

Avec le retour de la paix, la gentry européenne découvre les bains de mer. L’engouement autour de cette nouvelle activité est cependant terni par de nombreuses noyades.

En 1824, un projet d’institution est créé pour appliquer de nouvelles techniques de réanimation sur le modèle de la « Royal human society » de Londres. Ainsi, en 1825 est créée officiellement la « Société Humaine de Boulogne » avec pour mission de recruter des surveillants de baignade, formés à ces nouvelles méthodes de réanimation. Des sociétés humaines analogues sont fondées successivement à Calais, Dunkerque ,Dieppe , Bayonne, Saint Malo, Saint Servan, etc.

D’autres sociétés locales sont créées par les chambres de commerce au Havre (1839), à Honfleur et Cherbourg  (1865), Trouville, Deauville (1868) .Enfin, viennent le tour de La Société de sauvetage maritime de Provence (1863), la Société des marins-sauveteurs du Grau du Roi et d’Aigues-Mortes (1864), la Société des sauveteurs d’Alger ( 1876),la Société de sauvetage de Bône (1867).

1833
Une évolution décisive avec le naufrage de l'"Amphitrite"

En pleine saison estivale, le 31 août 1833, l’Amphitrite, un trois mâts affrété par le gouvernement britannique pour transporter 118  femmes et 23 enfants condamnés à la déportation en Australie, s’échoue à quelques encablures de la plage devant la population balnéaire.

Écoutez le récit du tragique naufrage de l'Amphitrite dans notre podcast Canal 16 ci-dessous :

Manquant l’entrée du port, l’Amphitrite s’échoue sur la plage vers 17 heures et malgré les efforts de son équipage, elle ne parvient pas à se sortir de cette situation. Sous les coups de bélier des vagues, la quille se brise, la coque se délie, les mâts se rompent. Bientôt le navire n’est plus qu’une épave que les éléments ne cessent de malmener. Devant l’imminence du danger, les pilotes Huret et Testard, avec huit équipiers, se précipitent vers le canot de sauvetage. Un jeune maître nageur, Pierre Hénin, les a devancés en rejoignant l’épave à la nage. Après trois tentatives infructueuses, il parvient à s’accrocher à un filin mais les marins de l’Amphitrite refusent de lui lancer une amarre.

Le capitaine du bateau, Hunter, a en effet interdit aux passagères de quitter le bord de peur qu’elles cherchent à s’évader. À bout de forces, Pierre Hénin renonce et regagne la plage. Le canot de sauvetage s’approche à son tour. Un équipier s’empare d’un cordage et le patron de l’embarcation demande au porte-voix qu’on le hale vers l’épave. Là encore, les marins de l’Amphitrite ne réagissent pas. À la tombée de la nuit, l’épave se disloque. De la plage, les Boulonnais entendent les hurlements des femmes prises au piège. Plusieurs hommes s’élancent dans l’eau pour les sauver ; ils sont repoussés par les douaniers qui redoutent les vols et le pillage. En empêchant l’organisation des secours à terre, les agents des douanes portent une lourde responsabilité dans le terrible bilan de la catastrophe.

À 2 heures du matin, 36 noyés sont ramenés à terre et au cours de la nuit, on retrouve 27 autres corps dans le port. Les jours suivants, la mer rejette d’autres cadavres de Boulogne au cap Gris-Nez. Au total, 108
femmes, 12 enfants et 13 hommes ont perdu la vie. Les survivants attribueront le naufrage à l’incompétence et à l’entêtement du capitaine qui n’avait pas compris que son navire était dans un état désespéré.

""
Le 31 août 1833, le navire marchand l’Amphitrite, en route pour Sydney, s’échoue et se fracasse, faisant de nombreuses victimes parmi les passagers et l’équipage. Son naufrage sera, dans une large mesure, à l’origine de la création des sociétés de secours.

En inspectant l’épave de l’Amphitrite, les sauveteurs s’apercevront que ce bâtiment était dans un très mauvais état et qu’il était manifestement hors d’état d’accomplir un voyage aussi long.

L’émotion internationale conséquente à ce naufrage favorisa la construction en 1834 du premier vrai canot de sauvetage à l’arsenal de Cherbourg sur plan Palmer, l'Amiral de Rosamel.

1855
Naufrage de la "Sémillante"

""
La "Sémillante" © Wikipedia

 Le 15 février 1855 à 11 heures, la Sémillante, frégate de 1er rang, appareille de Toulon pour Constantinople d’où elle repartira pour la Crimée où la guerre bat son plein. La frégate est armée par 301 officiers, mariniers et hommes d’équipage. Un détachement de 392 militaires de l’armée de terre a également pris place à bord, avec un matériel comprenant 4 canons de 24 livres, 16 mortiers, 1 000 obus, 1 500 bombes, 120 barils de poudre et divers accessoires pour canons et mortiers ainsi que des cabanes démontées et un assortiment de bois divers, le tout représentant une cargaison d’environ 400 tonnes.

Le temps est franchement mauvais mais le commandant Jugan n’a guère le choix. En Crimée, les armées alliées ont un besoin urgent des renforts qu’il transporte. Jugan décide donc de prendre la route la plus directe en passant par le sud de la Sardaigne, puis par le canal de Tunisie et le canal de Malte en direction du Péloponnèse. Au moment où la Sémillante passe au large de la Corse le temps se dégrade au point que Jugan décide de passer par les bouches de Bonifacio, entre la Corse et la Sardaigne où il espère trouver une zone plus abritée.

Malheureusement, un véritable ouragan s’est abattu sur Bonifacio. La frégate est emportée par la tempête. Le 16 au matin, l’abbé Rocca bénit la mer comme il est d’usage au moment d’une tempête, en implorant le créateur d’apaiser les flots. Sur la place Manichilla qui domine le détroit, les fidèles aperçoivent un grand bâtiment qui semble en perdition. À 11 heures, le gardien du phare de la Testa observe brièvement une frégate courant vers lui à sec de toile. Au moment où il va se jeter à la côte, le bâtiment hisse sa trinquette et vient sur bâbord pour entrer dans le goulet. Le gardien de phare le perd alors de vue. Poussée par un fort vent du sud, la Sémillante s’échoue sur un haut-fond rocheux et se brise instantanément. Le bruit « large et sourd pareil à celui d’un tonnerre venant de sous terre » est perçu par un berger.

Les 693 hommes qui se trouvaient à bord de la frégate périssent dans les minutes qui suivent sans que rien ne puisse être fait pour leur porter secours. Dans les jours qui suivent, des cadavres sont ramenés sur les grèves. Il n’y a aucun survivant.

1865
Création de la Société centrale de sauvetage des naufragés (SCSN)

Sortie du canot Baron Larrey de son abri à Bonifacio
À Bonifacio, le canot "Baron Larrey" était transporté de son abri jusqu’à la mer par un chariot, tracté par les sauveteurs. © SNSM

Par décret impérial du 12 février 1865, la Société centrale de sauvetage des naufragés (SCSN) est fondée. Reconnue d’utilité publique, cette société est placée sous la protection de l’impératrice Eugénie ; elle est présidée par l’amiral Rigault de Genouilly, futur ministre de la Marine.

Dans le style emphatique qui est de mise à l’époque, il lance aux marins sauveteurs cet appel vibrant : « En vous rangeant autour de la bannière du sauvetage, en prenant l’engagement de quitter au premier signal d’alarme vos familles et vos bateaux et d’exposer vos existences pour arracher à la mort vos semblables, vous avez fait preuve une fois de plus de cet admirable dévouement qui fait l’honneur des matelots français. Mais si vos courages et vos bras sont prêts, presque partout les moyens matériels vous manquent. Ces moyens, une société se fonde en ce moment pour vous les donner. En votre nom, nous adressons au pays un appel qui ne peut manquer d’être entendu ; car chacun, riche ou pauvre, habitant du littoral, des cités ou des campagnes, voudra en nous remettant son obole vous seconder dans votre œuvre de salut. Courage donc, braves marins ! Nos ressources ne nous permettront, il est vrai, de ne pourvoir que successivement à nos besoins et nous devons songer d’abord à ceux d’entre vous qui veillent près des parages les plus dangereux ; mais à peine constitués et sans plus attendre, nous avons voulu unir nos cœurs aux vôtres en vous adressant l’expression de notre vive sympathie et de notre cordiale confraternité. »

La Société centrale de sauve­tage des naufra­gés prend rapi­de­ment de l’am­pleur et des stations se créent en Bretagne : dès 1865 à Audierne et Saint-Malo ; à Groix, Roscoff et Oues­sant en 1866 et au Conquet et sur l’île de Sein en 1867.

1873
La Société des hospi­ta­liers sauve­teurs bretons (HSB)

""
Cano­tiers en tenue de mer à Audierne © SNSM

La Société des hospi­ta­liers sauve­teurs bretons est créée en 1873 par Henri Nadault de Buffon. Dans la formu­la­tion de ce que l’on appel­le­rait aujour­d’hui le projet asso­cia­tif, son fonda­teur précise que « cette œuvre est à la fois une insti­tu­tion de sauve­tage et de sauve­teurs et une société de bien­fai­sance, de mora­li­sa­tion et d’en­cou­ra­ge­ment au bien ».

Des postes de secours essaiment rapi­de­ment sur tout le litto­ral. À l’heure où les bains de mer connaissent une grande vogue, le doris ou le canot HSB monté par un retraité de la Marine natio­nale fait très vite partie du décor.

Malgré leurs petits moyens, les HSB, très proches des habi­tants, suscitent un capi­tal sympa­thie très impor­tant et leur souve­nir reste très fort aujour­d’hui encore, en Bretagne. Déjà à cette époque, les deux socié­tés vivent de dons et de legs.

1967
Création de la Société natio­nale de sauve­tage en mer

""
À Antibes, la station est équipée en 1969 d’un canot amarré près des pointus. © SNSM

À la sortie de la seconde guerre mondiale tout est à reconstruire. Parallèlement, les métiers de la mer reprennent de l’essor et les loisirs nautiques se développent.

La Société centrale de sauvetage des naufragés et la Société des hospitaliers sauveteurs bretons, dont les buts sont similaires ne peuvent plus répondre efficacement aux besoins sur l’ensemble du littoral français. Il devient nécessaire de réunir ces deux structures. Ainsi, à la demande des pouvoirs publics, les deux sociétés fusionnent en 1967 pour donner naissance à la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM). L’amiral Amman est le premier président de la toute nouvelle SNSM. Les Hospi­ta­liers sauve­teurs bretons apportent notam­ment 250 postes de secours répar­tis sur 210 sections litto­rales.

Créée sous la forme d’une association loi 1901, la SNSM, dont la vocation première est de secourir bénévolement et gratuitement les vies humaines en danger en mer et sur les  côtes, sera reconnue d’utilité publique en 1970. Elle est aujourd'hui présidée par l'Amiral Emmanuel de Oliveira.

1969
Premiers centres de formation

""
Damgan - Les secouristes du poste de plage (1968) © DR

Créa­tion des premiers centres de forma­tion des nageurs sauve­teurs à Rennes, Nantes, Paris et Marseille, aupa­ra­vant formés dans les stations et sections de sauve­tage.

1970
SNSM recon­nue d’uti­lité publique

La SNSM est recon­nue d’uti­lité publique par décret en Conseil d’Etat.

1986
Drame de l’Aber Wrac’h

Tout un équi­page de sauve­teurs périt en mer, en allant porter assis­tance à des plai­san­ciers. Une véri­table mobi­li­sa­tion publique et privée émerge alors au niveau natio­nal pour soute­nir l’ac­tion des Sauve­teurs en Mer.

2011
Ouver­ture du Pôle natio­nal de forma­tion

Ouver­ture d’un Pôle natio­nal de forma­tion à Saint-Nazaire. 

2017
Grande cause nationale

Le sauve­tage en mer est reconnu “Grande cause natio­nale 2017”. Célé­bra­tion du cinquan­te­naire de l’as­so­cia­tion au travers de mani­fes­ta­tions sur l’en­semble du litto­ral et à Paris. Insti­tu­tion des premières Jour­nées natio­nales des Sauve­teurs en Mer.

2019
Drame des Sables d'Olonne

3 sauveteurs meurent lors d'une intervention aux Sables d'Olonne.

2023
Intégration de la Société Humaine et des Naufrages (SHN) à la SNSM

En 2023, la station SNSM de Boulogne-sur-Mer, la Société Humaine et des Naufrages (SHN) est intégrée officiellement à la SNSM.